Prise de conscience
Oh la la, samedi je suis retombée un instant dans la réalité et c'était loin d'être agréable.
Il faisait assez gris et j'avais décidé, enfin pas tant décidé que ça, c'était plutôt une obligation qui devenait urgente, de me rendre à l'hôpital afin de récupérer mes 168 comprimés d'amphétamines.
Je ne sais pas pourquoi mais j'étais super angoissée. Je pense que c'est parce qu'on était samedi et que je n'avais jamais vu la Salpêtrière aussi déserte. D'habitude c'est comme une petite ville avec tout un tas de gens qui circulent, mais là il n'y avait pas un chat et comme je n'étais pas non plus d'humeur particulièrement joyeuse, cette désertitude n'éclaircissait en rien la couleur grisonnante de mon moral.
La pharmacie ou je récupère mes médicaments et qui en général grouille de monde, était elle aussi complètement désertée, mais j'ai quand même attendu un bon petit moment pour récupérer mes stupéfiants, mais heureusement la personne qui détient la clefs du coffre n'était pas en pause, ni en week-end.
Après avoir émis quelques baillements, j'ai signé la facture de 611,83 euros comme chaque mois mais cette fois ci elle avait un gout un peu amer et j'ai regardé les 6 boites de comprimés en prenant conscience pour la première fois que c'était peut-être ma mort que je ramenais avec moi.
Ces petits comprimés si couteux me permettent de vivre plus ou moins bien selon les jours mais raccourcissent en même temps cette même vie. Et si je fais un bilan de ces derniers mois, je n'ai pas l'impression d'avoir eu un réel bénéfice d'éveil qui nécessite le danger que représente les petits comprimés qui pourtant paraissent inoffensifs dans leur emballages très design.
Et pour la première fois je me demande si le risque en vaut vraiment la peine.
Mais je sais que pour en être certaine, il me suffit d'arrêter le traitement quelques jours et que je vais très vite en avoir marre d'être une larve, que je vais très vite reprendre les amphétamines en me disant que je m'en fou de ce qui peut bien m'arriver demain parce que de toutes façons je n'ai pas le choix, si je ne veux pas rester dans mon lit toute la journée à être dans un état d'anesthésié, je dois avaler les petits comprimés si couteux et si dévastateurs pour le reste de mon organisme.
Parfois c'est bien de ne pas avoir le choix, ça simplifie vachement la vie.